En 1994, Internet vu de la France
Par Arthur Caranta le lundi, octobre 20 2008, 00:47 - Internet - Réseau - Lien permanent
Ce soir, je donne dans le plagiat ... oui, oui, vous avez bien lu, ce soir je vais donner dans le plagiat. Bon c'est vrai que le concept du plagiat c'est pas de le dire et surtout de donner la source du pompage.
Donc ce soir, je vous copie un article paru dans Joystick ... en Novembre 1994 ... soit il y a 14 ans ... ouch ... encore un coup de vieux ... Enfin ... Donc cet article traitait d'Internet, "c'est quoi, y'a quoi dedans, etc etc" ...
Ca parait naïf, mais c'est, je trouve très rafraichissant avec 14 ans de recul et ce que l'on sait d'Internet maintenant ...
Bonne lecture !
Bon OK tout en bas, vous trouverez les page de l'article, c'est plus mieux pour lire
Dimanche d'octobre. Il fait gris à Paname. Un temps à ne pas
mettre un cyber-journaliste dehors. Mais qu'importe le spleen des
nuages, dans quelques minutes votre serviteur sera en liaison avec le
Texas, le Japon, les Iles Galapagos... Le temps de charger un petit
programme sous Windows, TCPman et me voici connecté sur le cyberspace,
cette constellation de données d'une complexité indescriptible qui
rassemble créatifs, allumés ou communicants. Je suis branché sur
l'Internet - le Net pour les intimes. Internet consiste en
l'interconnexion de milliers de réseaux à l'échelle mondiale. Cette
armada d'ordinateurs communiquant entre eux constitue un réservoir
d'informations ahurissant. L'activité qui règne sur cette toile
d'araignée mondiale laisse pantois. La plus dantesque des visions de
Fellini ne saurait dépeindre l'atmosphère qui règne sur la foire
télématique. Le méga-réseau puise, pétarade, vibre à la façon d'une
rythmique d'acid jazz. Un petit tour sur ma messagerie. Je lance le
programme Eudora et actionne la commande qui permet de récupérer mon
courrier électronique. j'avais laissé un message au président d'une
édition anglaise de logiciels de Réalité Virtuelle. Il m'a répondu.
J'apprends que je serai désormais informé des nouveautés en temps et en
heure. La prise de contact a été rapide et efficace, bien plus
que si j'étais passé par le téléphone ou le fax. Par ailleurs, un vieil
ami, Michael E., m'apprend qu'il a quitté Passport - éditeur de
logiciels musicaux - et s'est mis à son compte. Je lui écris un petit
message pour lui faire part de ma joie d'avoir retrouvé sa piste
-depuis deux ans, je n'avais plus de ses nouvelles.
À présent, je
lance le logiciel Mosaïc, afin de me balader sur le World Wide Web. Un
peu d'explications. Internet permet d'accéder à des milliers de
serveurs, gérés par des universités ou par des entités très officielles
(le Vatican, la NASA, la Maison Blanche...). Afin de permettre une
navigation aisée parmi ce maelstrôm d'informations (des milliards
d'octets), le laboratoire du CERN, à Genève, a développé le World Wide
Web (WWW) -toile d'araignée mondiale. Si l'on utilise une interface
graphique telle que Mosaïc, il suffit de cliquer sur des mots-clés du
WWW pour qu'aus-sitôt celui-ci éta-blisse la connexion avec le serveur
voulu. De façon transparente, nous nous connectons à des ordinateurs de
Grenoble, Aca-pulco, Bruxelles, Sri Lanka.... Chaque visite est une
aventure, tant il y a de choses à explorer sur le "Web" : archéologie,
jeux, cinéma, images du Louvre, fanzines électroniques, etc. Sur la
page d'accueil du WWW, je suis attiré par la mention "Music Land", les
serveurs des rock stars. Un clic sur "Guns and Roses" et voici
qu'apparaît l'image de l'album "Appetite". J'en profite pour la stocker
sur mon disque. Un petit tour chez Madonna ? Une image récemment
publiée dans les magazines américains est téléchargée depuis les USA
Comme elle est énorme - l'image, pas Madonna -, l'opération prend
plusieurs minutes. Si Internet n'a qu'un défaut, c'est d'être fort
lent, une situation due au trop grand nombre d'accès aux serveurs -
nous en reparlons plus loin. Peu après, la connexion plante purement et
simplement. Cela aussi est habituel sur Internet, les logiciels étant
fort complexes à paramétrer et les anomalies de transmission
extrêmement fréquentes. Comme souvent, je n'ai pas d'autre solution que
de rallumer la machine (Windows a déclaré forfait). Il y a quelques
jours, ma visite de l'application Louvre avait été plus heureuse : des
centaines de tableaux peuvent être visualisés avec commentaires à
l'appui. J'avais également récupéré un extrait de Nirvana sous forme de
fichier son.
Mais le WWW est parfois capricieux.
Je relance
Windows et TCPman pour me rebrancher sur Internet. À présent, je vais
me balader sur les newsgroups (forums). Accessibles à partir du
programme News, ils sont au nombre de 5 000 environ et traitent de tout
et n'importe
quoi : élevage des grenouilles, extra-terrestres,
Doom (le jeu), ordinateurs de poche... Il y en a pour tous les goûts -
si vous ne trouvez pas le forum correspondant à votre dada, rien ne
vous empêche de le créer. Sur les forums, les utilisateurs s'échangent
les points de vue les plus divers sur le thème générique. Ce qui est
formidable, c'est de pouvoir discuter avec des gens que l'on ne connaît
pas sur son sujet de prédilection. Personnellement, j'ai un faible pour
la music country, genre méconnu en France mais extrêmement populaire
aux USA. Je ne rate donc jamais une occasion d'aller sur le forum
"rec.music.country.western". Mathews, un utilisateur de l'Oregon, a
posé une
question. Il cherche un album dans lequel Tammy Wynette
chante "Stand by your man", de préférence sur une compilation. Je ne
résiste pas au plaisir de lui répondre ; les cow-boys sont toujours
étonnés de voir qu'un "frenchie" s'intéresse à la country. Je lui
transmets un message relatif à un CD acheté en Angleterre et qui
comporte le titre recherché, plus d'autres perles du genre. Ailleurs,
je tombe sur un débat qui m'intéresse au plus haut point. Plusieurs
membres d'Internet avouent s'être convertis récemment à la country et
ne pas comprendre pourquoi ce soudain engouement Je lis ces témoignages
avec intérêt, étant exactement dans le même cas, et me promets
d'apporter prochainement ma contribution. Je poursuis ma balade sur les
newsgroups en me contentant de jouer les "voyeurs" - regarder sans
participer. La moisson n'est pas triste. Une compagnie italienne a
placé une annonce pour des lentilles oculaires. La réponse de Thomas B.
est cinglante : "Est-ce qu'il faut vous envoyer nos yeux afin que vous
les testiez ? Ou pouvons-nous le faire sur le Net, après avoir passé un
scanner à main sur nos globes oculaires ?". Il est vrai que le commerce
a longtemps été proscrit sur Internet et qu'aujourd'hui encore, ceux
qui en abusent sont souverainement méprisés, voire insultés. Sur le
newsgroup de la MENSA (organisation qui regroupe les individus
supérieurement intelligents), je trouve la question d'un matheux en
herbe : pourquoi est-ce que n'importe quel nombre élevé à la puissance
0 est égal à I ? La réponse venant d'un surdoué est intimidante à
souhait... Sur un forum à caractère général, un hurluberlu demande si
quelqu'un connaît un logiciel permettant de planifier un mariage... Ma
consultation s'achève, ma soif de communication ayant été étan-chée. Si
nécessaire, j'aurais pu utiliser deux autres programmes (Archie et FTP
: voir glossaire) pour télécharger des fichiers. Dès demain, je
recommencerai et entrerai en contact avec des guitaristes, des
inventeurs, des programmeurs, des amateurs de tourisme... Le miracle
d'Internet est là. Incontrôlable et débridé, le réseau des réseaux
évoque une mégalopole qui aurait poussé de façon spontanée, sans
restriction aucune. "Pourquoi les gens veulent-ils aller sur l'Internet
?" explique l'auteur de science-fiction Bruce Sterling. "L'une des
raisons simples est la liberté pure. L'Internet est un exemple rare
d'une véritable anarchie moderne et fonctionnelle. Il n'existe pas de
chef, pas de censeur, pas d'actionnaires. N'importe qui peut se
connecter à n'importe qui". Mais comment s'est développée cette galaxie
communicante ? Comment a-t-elle proliféré ? Le fait étrange est
qu'Internet est né d'une vilaine angoisse datant de la guerre froide :
comment les autorités américaines pourraient-elles assurer la
transmission d'informations en cas d'attaque nucléaire ? Le modèle en
vigueur au début des années 60 -ordinateur central puissant - a été
écarté : il eût été une proie facile pour les missiles ennemis. L'idée
d'un réseau de machines interconnectées a germé.
La proposition
remise en 1964 au Pentagone définissait un réseau dans lequel tous les
ordinateurs reliés seraient capables de relayer des messages aux
autres. Toute information envoyée arriverait à bon port quel que soit
le chemin à emprunter pour y parvenir. Ainsi, la destruction d'un ou
plusieurs ordinateurs du réseau n'empê-cherait pas un acheminement
correct ] du message.
En décembre 1969, les premiers "nœuds"
(ordinateurs) du réseau sont en opération sous l'égide du Pentagone, et
l'ensemble est baptisé ARPANET. Plusieurs équipes de savants et
chercheurs commencent à se connecter, trop heureux de pouvoir consulter
les fichiers d'autres ordinateurs et même de les programmer à distance.
Dès 1972, ARPANET recense 37 nœuds. Rapidement, le réseau est détourné
à une fin pratique : la messagerie. Les utilisateurs prennent goût à
l'échange de courrier électronique et de rapports, ou simplement au
bavardage collectif sur un thème. Le système des listes de messagerie
est développé : il permet de communiquer un même message à un grand
nombre d'utilisateurs concernés par un sujet L'une des premières
listes, SF-LOVERS est dédiée aux amateurs de science-fiction. Du fait
de sa facilité d'adaptation à divers types de machines, ARPANET connaît
une croissance continue. Vers le milieu des années 70, des
universitaires inventent un standard de communication inter-réseau
qu'ils baptisent TCP/IP (Transmission Control Protocol/Internet
Protocol). Du fait qu'il soit diffusé gratuitement, TCP/IP est
naturellement utilisé pour relier de nombreux réseaux, et de fil en
aiguille, en vient à embrasser ARPANET. En 1977, l'armée américaine
désolidarise la partie militaire du lot, et le réseau, qui n'a cessé de
croître, commence à ressembler à ce que nous connaissons sous le nom
d'Internet.
À partir de 1984, plusieurs agences gouvernementales
se connectent au réseau, ouvrant à des dizaines de milliers
d'ordinateurs leurs gigantesques bases de données : la National Science
Foundation (NSF), la NASA, le ministère de l'Énergie, des universités
du monde entier rejoignent la communauté virtuelle. Dès la fin des
années 80, l'Internet est composé de plusieurs dizaines de milliers de
nœuds raccordant 3 à 4 millions d'utilisateurs. L'explosion se produit
vers 1993 sous l'impulsion d'AI Gore et Bill Clinton qui citent le
réseau comme un modèle des fameuses inforoutes censées relier chaque
foyer américain. Comme il suffît de posséder un ordinateur et un modem
| pour se brancher, le grand public est pris d'une soudaine frénésie de
connexion. À tel point que l'on parle aujourd'hui de 20 millions
d'utilisateurs.
Jusqu'à l'aube des années 90, les cyber-communicants
se connectaient avec une motivation précise (échange d'idées,
collaboration sur un projet, entraide). La situation a radicalement
changé avec l'arrivée de fournisseurs d'accès à grande échelle, tels
qu'America Online. Ce service américain qui regroupe plus d'un million
d'abonnés a ouvert un accès à Internet en mars 1994. Du jour au
lendemain, 600 000 curieux ont débarqué sur les forums, sur les
serveurs des universités, semant la panique parmi les habitués... Les
médias avaient abondamment loué les vertus du méga-réseau, vantant la
surabondance de l'Internet : images, textes, logiciels... Un grand
nombre de nouveaux utilisateurs a débarqué avec une mentalité de
pique-assiettes, trop heureux de télécharger qui une image de Claudia
Schiffer, qui un anti-virus, qui un extrait de Shakespeare... Sur les
forums, les néophytes se sont bien souvent conduits sans égard pour la
"neti-quette" - un ensemble de règles de bon comportement
communautaire. Pire que tout, des messages publicitaires ont fait leur
apparition, alors que la règle originelle instituait que l'Internet ne
devait jamais servir à des transactions commerciales. Le succès
d'Internet a également eu pour effet de saturer le réseau, certains
sites ayant reçu jusqu'à 700 000 appels simultanés.
Dans la
mesure où ils ne peuvent traiter un tel volume de demandes, les
serveurs adoptent diverses démarches. Certains refusent l'accès lors
des heures de pointe, d'autres font attendre et attribuent un numéro
dans une file d'attente. Ceux qui sont affiliés à l'Internet depuis les
heures héroïques se plaignent à juste titre du ralentissement flagrant
des temps de réponse. Toute la question consiste à savoir si la
puissance d'accueil des serveurs augmentera suffisamment rapidement
pour engranger l'afflux toujours croissant de curieux.
La navigation
sur cet océan de données est un plaisir extraordinaire, une expérience
indescriptible que nous ne saurions trop vous conseiller, tout en vous
incitant à respecter la "netiquette" pour contribuer à perpétuer ce qui
fait le charme de la communauté invisible qui regroupe vos futurs amis
virtuels.
Par Daniel Ichbiah, paru dans le magazine Joystick N°54, Novembre 1994
Bon, Allez OK, voila aussi les pages numérisées de l'article ...